Mot-clé : « Cocheris (Hippolyte) »

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Le Livre, tome I, p. 098-122

Albert Cim, Le Livre, t. I, p. 98.
Albert Cim, Le Livre, t. I, p. 98 [122]. Source : Internet Archive.

d’amitié avec Richard de Bury[001.1], le plus enthousiaste apologiste : « J’ai des amis dont la société est délicieuse pour moi. Mes livres, ce sont des gens de tous les pays et de tous les siècles, distingués à la guerre, dans la magistrature et dans les lettres, aisés à vivre, toujours à mes ordres. Je les fais venir quand je le veux, et je les renvoie de même. Ils n’ont jamais d’humeur et répondent à toutes mes questions. Les uns déroulent devant moi les événements des siècles passés ; d’autres me dévoilent les secrets de la nature ; ceux-ci m’apprennent à bien vivre et à bien mourir ; ceux-là chassent l’ennui par leur gaieté et m’amusent par leurs saillies ; il y en a qui disposent mon âme à tout souffrir, à ne rien désirer, et me font connaître à moi-même. En un mot, ils m’ouvrent les portes de tous les arts et de toutes les sciences : je les trouve dans tous mes besoins…. Pour prix de si grands services, ils ne demandent qu’une chambre bien fermée dans un coin de ma petite maison, où ils soient à l’abri de leurs ennemis (c’est-à-dire de l’humidité et des souris). Enfin, je les mène avec moi dans les champs, dont le silence leur convient mieux que le tumulte des cités[001.2]. »

« Je ne puis me rassasier de livres, écrivait-il

[I.122.098]
  1.  Cf. Cocheris, op. cit., Notice biographique, p. xvii ↩
  2.  Ap. Darche, Essai sur la lecture, p. 372 ; et Fertiault, les Amoureux du livre, pp. 269-270.  ↩

Le Livre, tome I, p. 093-117

Albert Cim, Le Livre, t. I, p. 93.
Albert Cim, Le Livre, t. I, p. 93 [117]. Source : Internet Archive.
Albert Cim, Le Livre, t. I, p. 94.
Pour suite de note : Albert Cim, Le Livre, t. I, p. 94 [118]. Source : Internet Archive.

A desenor muert à bon droit
Qui n’aime livre ne ne croit.

« Celui-là meurt à bon droit déshonoré, qui n’aime livre ni ne croit. »

Durant la première moitié du xive siècle, fut composé un opuscule latin Philobiblion, Tractatus pulcherrimus de amore librorum[093.1], tout entier consacré à la louange du livre, et qu’on peut considérer comme le plus ancien ouvrage de bibliophilie que nous ait légué le moyen âge[093.2] Ce petit livre est d’une importance capitale dans le sujet qui nous occupe. L’auteur, Richard de Bury (1287-1345), avait été successivement évêque de Durham, grand chancelier et trésorier d’Angleterre, et il fut le fondateur de la bibliothèque d’Oxford, la seconde des bibliothèques ouvertes au public, la première étant, comme nous l’avons vu, celle du Vatican[093.3]. C’est peu de temps avant sa mort, survenue le 14 avril 1345, que Richard de Bury termina son Philobiblion, dont plusieurs copies ne tardèrent pas à se répandre, et qui fut imprimé pour la première fois en 1473[093.4]. « Les livres, écrit le judicieux évêque[093.5], ce sont des

[I.117.093]
  1.  Hippolyte Cocheris en a donné une excellente édition avec traduction (Paris, Aug. Aubry, 1856. In-16).  ↩
  2.  Cf. Lalanne, op. cit., p. 186.  ↩
  3.  Cf. supra, p. 80.  ↩
  4.  Cf. Cocheris, op. cit., Introduction, pp. xv et xxii ↩
  5.  Philobiblion, chap. i, pp. 16-17 et 207 : « Hi sunt magistri, qui nos instruunt sine virgis et ferula, sine verbis et cholera, sine pannis et pecunia. Si accedis, non dormiunt ; si inquirens interrogas, non se abscondunt ; non remurmurant, si oberres ; cachinnos nesciunt, si ignores. »  ↩

Le Livre, tome I, p. 082-106

Albert Cim, Le Livre, t. I, p. 82.
Albert Cim, Le Livre, t. I, p. 82 [106]. Source : Internet Archive.
Albert Cim, Le Livre, t. I, p. 83.
Pour suite de note : Albert Cim, Le Livre, t. I, p. 83 [107]. Source : Internet Archive.

obligé, l’ennemi déclaré et forcé, de l’antiquité grecque et latine. « Quelques conciles avaient défendu aux évêques de lire les livres des païens, et saint Grégoire reprit sévèrement Didier, évêque de Vienne, de ce qu’il enseignait la grammaire[082.1]. » Ce pape saint Grégoire, Grégoire le Grand, passe pour avoir livré aux flammes un grand nombre d’ouvrages anciens, Tite-Live, entre autres[082.2]. Au xiiie siècle encore, la règle des Dominicains s’opposait à ce qu’ils étudiassent les livres païens[082.3].

[I.106.082]
  1.  Abbé Fleury, Mœurs des chrétiens, IV, 4, p. 275. (Paris, Dezobry, 1853.)  ↩
  2.  Cf. Lalanne, op. cit., pp. 199-200. « Ajoutons, dit Lalanne en ce même endroit, que si ce pape n’a pas brûlé les auteurs de l’antiquité, on peut croire, d’après son mépris prononcé pour la littérature profane, qu’il était bien capable de le faire. » En effet, il se vantait « de ne pas éviter le désordre du barbarisme, de dédaigner d’observer les cas des prépositions ; car je regarderais comme une indignité de plier la parole divine sous les lois du grammairien Donat ». Apprenant que Didier, l’évêque de Vienne (Dauphiné), donnait des leçons de grammaire, il lui écrit : « On me rapporte une chose que je ne puis répéter sans honte ; on dit que Ta Fraternité explique la grammaire à quelques personnes. Nous sommes affligés… car les louanges de Jupiter ne peuvent tenir dans une seule et même bouche avec celles de Jésus-Christ. » (Cf. Demogeot, Histoire de la littérature française, p. 53 ; Bayle, Dictionnaire historique et critique, t. VII, pp. 225-226, Paris, Desoer, 1820 ; etc.) « II est rapporté dans la Vie de saint Jérôme qu’il fut battu de verges par un ange, qui lui reprochait, en le frappant, de lire avec plus d’ardeur Cicéron que l’Évangile. » (Lacordaire, ap. Sainte-Beuve, Nouveaux Lundis, t. IV, p. 404.)  ↩
  3.  Cf. Cocheris, Introduction au Philobiblion, p. xliii : « Le règlement des Dominicains s’opposait à ce qu’ils étudiassent les livres païens : « In libris gentilium philosophorum non studeat, et si ad horam suscipiat seculares scientias, non addiscat, nec artes quas liberales vocant ». Cet article très explicite est suivi d’un autre, qui les invite à ne lire que les écrits théologiques : « sed tantum libros theologicos tam juvenes quam alii legant ». Etc.  ↩