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Le Livre, tome III, p. 087-101

Albert Cim, Le Livre, t. III, p. 87.
Albert Cim, Le Livre, t. III, p. 87 [101]. Source : Internet Archive.

pour les auteurs modernes, on se sert du terme édition originale[087.1].

Une édition est dite définitive ou ne varietur quand le texte en a été revu par l’auteur ou par ses ayants droit, et déclaré par eux désormais arrêté et invariable.

Ces définitions terminées, revenons au format.

De ce que nous avons dit de la fabrication actuelle du papier, fabrication mécanique sur la toile sans fin, et non plus uniquement à la forme, il résulte que les papiers d’aujourd’hui n’ont plus de dimensions régulièrement et fixement délimitées. Il convient d’observer aussi tout d’abord que ces expres-

[III.101.087]
  1.  Nous avons vu (t. I, pp. 146-147) que le ministre protestant et passionné bibliophile du xviie siècle David Ancillon recherchait de préférence les premières éditions des livres, « quoiqu’il y eût beaucoup d’apparence qu’on les réimprimerait avec des augmentations et avec des corrections ». (Bayle, Dictionnaire, art. Ancillon, t. II, p. 71.) « Au dire de M. de Sacy (Bulletin du bibliophile, 1868, p. 638), c’est Aimé Martin qui a remis les éditions originales en honneur…. Jules Janin attribue la même initiative à Armand Bertin. » (Gustave Mouravit, le Livre et la Petite Bibliothèque d’amateur, p. 434.)  ↩

Le Livre, tome II, p. 340-356

Albert Cim, Le Livre, t. II, p. 340.
Albert Cim, Le Livre, t. II, p. 340 [356]. Source : Internet Archive.

« Vous ne manquez jamais, Lupercus, à chaque rencontre, de me dire : « Voulez-vous que je vous envoie mon esclave, et voulez-vous lui confier votre petit volume d’Épigrammes, que je vous renverrai dès que je l’aurai lu ? » Il est inutile, Lupercus, que vous donniez cette peine à votre esclave. La route est longue de chez vous au Poirier ; de plus je loge au troisième étage, et les étages sont très hauts. Ce que vous demandez, vous n’avez pas à le chercher si loin. Vous êtes un habitué de l’Argi­lète[340.1] : or, près du forum de César se trouve une boutique, dont la devanture est toute couverte de titres d’ouvrages, de sorte qu’on y lit d’un coup d’œil les noms de tous les poètes. Là, vous me demanderez, en vous adressant à Atrectus ; c’est le nom du marchand. Du premier ou du second casier il tirera un Martial bien poli et orné de pourpre, qu’il vous vendra cinq deniers. — « C’est trop cher, » dites-vous. — Vous avez raison, Lupercus[340.2]. »

Nous avons vu Bayle (1647-1706) tout à l’heure[340.3] maugréer contre certaine emprunteuse qui lisait

[II.356.340]
  1.  L’Argilète, comme nous l’avons dit (t. I, pp. 24-26), était le quartier de Rome habité de préférence par les libraires.  ↩
    •  Occurris quoties, Luperce, nobis,
      Vis mittam puerum, subinde dicis,
      Cui tradas Epigrammaton libellum,
      Etc.

     (Martial, Épigrammes, livre I, 118, trad. Nisard, p. 359. — Cf. aussi livre IV, 72, p. 401.  ↩

  2.  Page 336, note 1.  ↩

Le Livre, tome II, p. 222-238

Albert Cim, Le Livre, t. II, p. 222.
Albert Cim, Le Livre, t. II, p. 222 [238]. Source : Internet Archive.
Albert Cim, Le Livre, t. II, p. 223.
Pour suite de note : Albert Cim, Le Livre, t. II, p. 223 [239]. Source : Internet Archive.

plus le privilège des bibliomanes que des inventeurs, comme l’a bien prouvé Balzac dans sa Recherche de l’absolu, — que de tous les amoureux et de tous les passionnés, tous les exaltés et tous les possédés — passionnés et possédés de la femme, de l’argent ou du pouvoir.

Nous allons passer en revue les plus curieux exemples de bibliomanie et de bibliolâtrie, — revue succincte et sommaire, qu’il eût été facile de prolonger, et qui demanderait à elle seule tout un volume.

Le célèbre helléniste Guillaume Budé (1467-1540) trouva moyen, le jour même de son mariage, de ne pas délaisser ses livres, ses muets trésors, et de passer au milieu d’eux « pour le moins trois heures », — ce qui ne l’empêcha pas, du reste, de devenir père de sept fils et de quatre filles. C’est lui aussi, raconte-t-on, qui, pour ne pas quitter son cabinet et s’arracher à la page commencée, répliqua à un domestique, qui venait lui annoncer, tout haletant, que le feu était à la maison : « C’est bien, avertissez ma femme. Vous savez bien que je ne m’occupe pas des affaires du ménage[222.1] ! »

[II.238.222]
  1.  Cf. Bayle, Dictionnaire historique et critique ; Fertiault, les Légendes du livre, pp. 93 et 199. — Une réponse analogue fut, dit-on, faite par Corneille à un « jeune homme, auquel il avait accordé sa fille, et que l’état de ses affaires mettait dans la nécessité de rompre ce mariage ». Ce jeune homme se présente un matin chez Corneille, et pénètre jusqu’à son cabinet de travail : « Je viens, monsieur, lui dit-il, retirer ma parole, et vous exposer les motifs de ma conduite. — Eh ! Monsieur, réplique Corneille, ne pouviez-vous, sans m’interrompre, parler de tout cela à ma femme ? Montez chez elle ; je n’entends rien à toutes ces affaires-là…. » (Helvétius, De l’esprit, Discours IV, chap. i, t. II, p. 278, note ; Paris, Chasseriau, 1822.)  ↩

Le Livre, tome II, p. 195-211

Albert Cim, Le Livre, t. II, p. 195.
Albert Cim, Le Livre, t. II, p. 195 [211]. Source : Internet Archive.
Albert Cim, Le Livre, t. II, p. 196.
Pour suite de note : Albert Cim, Le Livre, t. II, p. 196 [212]. Source : Internet Archive.

X. Les journaux

La vraie lecture, c’est celle du livre. Le journal a sur le livre le désavantage d’être fait trop vite, forcément, — et ce qu’on fait vite, forcément encore et inévitablement, manque de soin et de maturité[195.1] ; de ne parler presque exclusivement que de choses éphémères et d’une importance relative ; de ne posséder enfin ni le format, ni la commodité et l’élégance du livre.

Bayle (1647-1706) était d’avis que « le journal n’est, pour ainsi dire, qu’un dessert de l’esprit » ; et, ajoute Sainte-Beuve, qui rapporte ce mot[195.2], « il faut faire provision de pain et de viande solide avant de se disperser aux friandises[195.3] ».

[II.211.195]
  1.  Et cependant combien de livres sont « journaux » en ce point ! Mais ici la rapidité et la négligence ne sont pas essentielles à l’œuvre, elles ne proviennent que de l’auteur ; tandis que le journal, pressé par l’actualité, aiguillonné par la concurrence, est tenu de se hâter avant tout.  ↩
  2.  Portraits littéraires, t. I, p. 370.  ↩
  3.  « Une bonne soupe est excellente, le matin, en se levant, et non moins bonne pour l’esprit la lecture d’un chapitre de Montaigne. Le nourrissant Montaigne fait penser à cet Anglais qui mangeait toujours un bifteck avant son dîner, le dîner fût-il de quatre services. Quand un homme a lu le matin un chapitre de Montaigne, alors seulement il peut grignoter sans danger les articles de journaux. » (Champfleury, Notes intimes, Souvenirs et Portraits de jeunesse, pp. 253-254.)  ↩

Le Livre, tome II, p. 146-162

Albert Cim, Le Livre, t. II, p. 146.
Albert Cim, Le Livre, t. II, p. 146 [162]. Source : Internet Archive.
Albert Cim, Le Livre, t. II, p. 147.
Pour suite de note : Albert Cim, Le Livre, t. II, p. 147 [163]. Source : Internet Archive.

Nous avons vu ce que disait David Ancillon[146.1] : « Il est certain que moins les yeux ont de peine à lire un ouvrage, plus l’esprit a de liberté pour en juger ; comme on y voit plus clair, et qu’on en remarque mieux les grâces et les défauts lorsqu’il est imprimé que lorsqu’il est écrit à la main, on y voit aussi plus clair quand il est imprimé en beaux caractères et sur du beau papier, que quand il l’est sur du vilain et en mauvais carac­tères[146.2]. »

Et « notre bon Rollin » : « Une belle édition, qui frappe les yeux, gagne l’esprit, et, par cet attrait innocent, invite à l’étude[146.3] ». « Tous ceux qui aiment les livres comprendront cela », ajoute M. Mouravit[146.4].

[II.162.146]
  1.  Cf. supra, t. I. p. 146.  ↩
  2.  Ap. Bayle, Dictionnaire historique et critique, art. Ancillon, t. II, p. 70. (Paris, Desoer, 1820.)  ↩
  3.  Ap. Mouravit, le Livre et la Petite Bibliothèque d’amateur, p. 159.  ↩
  4.  Ibid. Voici un exemple qui confirme l’assertion du « bon Rollin » : « Un de nos illustres contemporains, grand ami des livres, se plaît, en montrant sa riche bibliothèque, à déclarer qu’il étudie avec plus de facilité dans un bel exemplaire, et qu’il choisit toujours pour cela celui dont le papier est le plus ferme au toucher et la justification typographique la plus agréable à l’œil. Nous sommes tout à fait de son avis : il sort d’un beau livre une sérénité calme, une heureuse harmonie, qui rendent attrayants les plus graves travaux. En vérité, c’est une chose très désirable, dans un livre, que la bonne condition ; elle annonce presque toujours d’ailleurs la bonne édition, dont la recherche indique un nouveau genre de préférences, plus sérieuses que les préférences artistiques. » (Antony Méray, les Diverses Façons d’aimer les livres : Annuaire du Bibliophile, 1861, p. 150 ; Paris, Meugnot 1861.) Remarquons cependant que « les beaux livres » ne sont pas et ne peuvent pas être des instruments de travail. M. Henri Beraldi (cité par Mme Renée Pingrenon, la Vénération du livre, Revue biblio-iconographique, février 1904, pp. 88-89) dit à ce sujet : « … Vous n’êtes pas sans posséder probablement quelques plats ou quelques assiettes de vieille faïence ? — Oui, certes, comme tout le monde aujourd’hui. — Mangez-vous dedans ? — Par exemple ! Pour les casser ! Je les accroche aux murs comme ornement, et je les regarde. — Eh bien ! cher monsieur, il en est de même des livres. Pour lire, je prends des volumes Charpentier et Hachette (2 fr. 75). Mais les livres rares ne sont pas des instruments de travail, ce sont des objets de curiosité précieux, faits pour être manipulés modérément et avec précaution, tout comme une porcelaine de Chine. »  ↩

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