— disait-il de la Bibliothèque du Roi, en 1781, — prouve que le nombre des livres ne fait pas les richesses de l’esprit humain. C’est dans une centaine de volumes que résident son opulence et sa véritable gloire…. Qui saisira un flambeau pour anéantir cet absurde amas de vieilles et folles conceptions (c’est toujours de la Bibliothèque royale qu’il s’agit), que le génie, méconnaissant ses propres forces et se confiant en autrui, va consulter encore dans ses premières années, et qui lui font perdre un temps précieux ! »
C’était à peu près ou plutôt absolument le même langage que tenait au bibliophile Jacob, à qui j’emprunte ces détails[309.1], non pas un révolutionnaire, un énergumène ou un halluciné, mais un savant de l’Institut, un ministre de Napoléon III, le maréchal Vaillant (1790-1872) : « Je vous fais de la peine, reprit le maréchal en voyant mon air consterné, — continue le bibliophile Jacob ; — je ne puis pas cependant vous cacher ce que je répète sans cesse au conseil des ministres : Les bibliothèques publiques ne servent qu’à nourrir les vers et les souris, en coûtant beaucoup d’argent à l’État, et en occupant de vastes bâtiments qu’on pourrait mieux employer…. — Oui, répliquai-je audacieusement, si on les transformait en casernes ?… — Pourquoi pas ? repartit vivement le ministre, qui n’aimait pas la
- L’Intermédiaire des chercheurs et curieux, 10 février 1877, col. 75-76. ↩