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Mot-clé : « Montaigne »

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Le Livre, tome II, p. 161-177

Albert Cim, Le Livre, t. II, p. 161.
Albert Cim, Le Livre, t. II, p. 161 [177]. Source : Internet Archive.

VI. Livres anciens et livres nouveaux

« Je ne me prends guères aux nouveaux (livres), pour ce que les anciens me semblent plus pleins et plus roides, » nous déclare Montaigne[161.1] ; et, tout en estimant que « les livres anciens sont pour les auteurs, les nouveaux pour les lecteurs, » Montesquieu[161.2], par la plume d’un des personnages de ses Lettres persanes, fait cet aveu : « Il me semble que, jusqu’à ce qu’un homme ait lu tous les livres anciens, il n’a aucune raison de leur préférer les nouveaux ».

M. Albert Collignon, grand admirateur de Mon-

[II.177.161]
  1.  Essais, livre II, chap. x; t. II, p. 210. (Paris, Charpentier, 1862.)  ↩
  2.  Pensées diverses, Des anciens (Œuvres complètes, t. II, p. 424), et Lettres persanes, CIX (t. III, p. 128 ; Paris, Hachette, 1866). « J’avoue mon goût pour les anciens, écrit encore Montesquieu (Pensées diverses, Des anciens, ibid.) ; cette antiquité m’enchante, et je suis toujours prêt à dire avec Pline [Pline le Jeune, Lettres, VIII, 24] : « C’est à Athènes que vous allez : respectez les dieux ». « Et lui-même, ajoute Sainte-Beuve (Causeries du lundi, t. VII, p. 44), en sentant ainsi, il a mérité d’être traité comme un ancien : citer Montesquieu, en détacher un mot qu’on place dans un écrit, cela honore. »  ↩

Le Livre, tome II, p. 120-136

Albert Cim, Le Livre, t. II, p. 120.
Albert Cim, Le Livre, t. II, p. 120 [136]. Source : Internet Archive.

Religion et morale

Philosophie politique et morale
Histoire naturelle, etc.

[II.136.120]
  1.  Mably est à présent bien oublié et dépassé.  ↩
  2.  Dans sa lettre Du moyen de dresser une bibliothèque… (Œuvres, t. X, p. 116), La Mothe-Le Vayer dit que Pline l’Ancien est, à lui seul, « une bibliothèque entière » ; et Le Gallois, dans son Traité des plus belles bibliothèques de l’Europe (p. 2), confirme cet éloge par ce distique :
    •  Quid juvat innumeris repleri scrinia libris ?
      Unus præ cunclis Plinius esse potest.  ↩

Le Livre, tome II, p. 097-113

Albert Cim, Le Livre, t. II, p. 097.
Albert Cim, Le Livre, t. II, p. 097 [113]. Source : Internet Archive.
Albert Cim, Le Livre, t. II, p. 098.
Pour suite de note : Albert Cim, Le Livre, t. II, p. 098 [114]. Source : Internet Archive.

plicité des chemins trompe souvent le voyageur. Celui qui marchait sûrement sur une seule route hésite entre deux chemins, et son embarras redouble dans un carrefour de trois ou quatre chemins. De même souvent celui qui aurait lu avec fruit un seul livre en a ouvert et feuilleté plusieurs inutilement. »

Il y a des passionnés des livres et de l’étude qui, littéralement, se gavent et se soûlent de lectures, s’en abrutissent. C’est à leur sujet et contre leur intempérance que Montaigne, entre autres devises et sentences, avait fait inscrire celle-ci sur une des solives de sa « librairie » : Ne plus sapias quam necesse est, ne obstupescas ; « ce que nous nous permettons de traduire un peu librement : N’ayez pas trop de livres, de peur de vous abêtir, » ajoute M. Gustave Mouravit[097.1].

« Dieu merci, s’écrie Gui Patin[097.2], je suis à l’épreuve

[II.113.097]
  1.  Le Livre et la Petite Bibliothèque d’amateur, p. 41.  ↩
  2.  Ap. Peignot, Manuel du bibliophile, t. I, p. 122. Nous avons vu ci-dessus, tome I, page 131, que cette bibliothèque « peu garnie » se composait de dix mille volumes. Gui Patin l’estimait, en 1661, « plus de quarante mille francs », ce qui en représenterait aujourd’hui plus de deux cent mille. (Cf. Gui Patin, lettre du 3 juin 1661 : Lettres choisies, t. II, p. 274 ; la Haye, Van Bulderen, 1715.)  ↩

Le Livre, tome II, p. 069-085

Albert Cim, Le Livre, t. II, p. 069.
Albert Cim, Le Livre, t. II, p. 069 [085]. Source : Internet Archive.

qu’utiles, se peuvent trouver dans des lectures sans ordre et décousues. Au bout de quelques minutes, tout livre dont on ne pourra rien tirer qui vous fasse penser sera rejeté comme vide et inutile, et voilà encore un autre avantage de l’habitude que je conseille de prendre[069.1]. »

Prendre des notes, la mémoire humaine est si courte, si fugitive, qu’il n’y a pas d’autre moyen à employer pour qui veut garder trace de ses lectures.

Pline l’Ancien, comme nous l’apprend son neveu, « faisait toujours des remarques et des extraits de ses lectures, et n’a jamais rien lu sans extraire[069.2] ».

« Pour subvenir un peu à la trahison de ma mémoire, et à son défault, si extrême, nous avoue Montaigne[069.3], qu’il m’est advenu plus d’une fois de reprendre en main des livres comme récents et à moi incognus, que j’avais lu soigneusement quelques années auparavant, et barbouillé de mes notes, j’ai pris en coustume, depuis quelque temps, d’adjouter, au bout de chaque livre (je dis de ceulx desquels je ne me veulx servir qu’une fois), le temps auquel j’ai achevé de le lire, et le jugement que j’en ai retiré en gros, » etc.

« On n’apprend jamais rien quand on ne fait que

[II.085.069]
  1.  Albert Collignon, la Religion des Lettres, pp. 194-197.  ↩
  2.  « Nihil enim legit, quod non excerperet » (Pline le Jeune, Epistolæ, III, 5 ; t. I, p. 190 ; Paris, veuve Barbou, 1808.)  ↩
  3.  Essais, livre II, chap. x ; t. II, p. 226. (Paris, Charpentier, 1802.)  ↩

Le Livre, tome II, p. 063-079

Albert Cim, Le Livre, t. II, p. 063.
Albert Cim, Le Livre, t. II, p. 063 [079]. Source : Internet Archive.
Albert Cim, Le Livre, t. II, p. 064.
Pour suite de note : Albert Cim, Le Livre, t. II, p. 064 [080]. Source : Internet Archive.
Albert Cim, Le Livre, t. II, p. 065.
Pour suite de note : Albert Cim, Le Livre, t. II, p. 065 [081]. Source : Internet Archive.

ordre et sans desseing, à pièces descousues[063.1] ». « Les abeilles pillotent deçà delà les fleurs ; mais elles en font après le miel, qui est tout leur ; ce n’est plus thym ni marjolaine : ainsi les pièces empruntées d’aultruy, il (un enfant, le fils de la comtesse de Gurson, — et c’est surtout ce qu’a fait Montaigne lui-même) les transformera et confondra pour en faire un ouvrage tout sien, à savoir son jugement[063.2]…. »

Étienne Pasquier de même : « Tout ainsi que l’abeille sautelle d’une fleur à autre, pour prendre sa petite pâture dont elle forme son miel, aussi lis-je ores l’un, ores un autre auteur, comme l’envie m’en prend[063.3] ».

C’est le mot de Lucrèce :

Floriferis ut apes in saltibus omnia libant (ou limant),
Omnia nos itidem depascimur aurea dicta[063.4].

[II.079.063]
  1.  Essais, livre III, chap. iii ; t. III, p. 366. (Paris, Charpentier, 1862.)  ↩
  2.  Montaigne, op. cit., livre I, chap. xxv ; t. I, p. 205.  ↩
  3.  Cf. supra, t. I, pp. 121-122.  ↩
  4.  « De même que l’abeille recueille tout nectar dans les prés en fleur, nous aspirons tout le suc de tes paroles d’or. » (De la nature des choses, III, vers 11-12 ; p. 145 ; Paris, Lefèvre, 1845.) La même comparaison reparaît bien souvent chez les anciens comme chez les modernes : cf. Horace (Odes, IV, 2, trad. Panckoucke, p. 114 ; Paris, Garnier, 1866) : « Ego, apis Matinæ », etc. : « Pour moi, semblable à l’abeille du mont Matinus, qui va butiner laborieusement sur le thym odoriférant, j’erre dans les bois et près des ruisseaux qui arrosent Tibur ; et là, faible poète, je forge péniblement mes vers » ; et Sénèque (Lettres à Lucilius, 84, trad. Baillard. p. 243 ; Paris, Hachette, 1860) : « Imitons, comme on dit, les abeilles, qui voltigent çà et là, picorant les fleurs propres à faire le miel, qui ensuite disposent et répartissent tout le butin par rayons…. » ; et Plutarque (Comment il faut lire les poètes, trad. Amyot, t. VIII, p. 100 ; Paris, Bastien, 1784) : « Or tout ainsi comme ès pasturages l’abeille cherche pour sa nourriture la fleur, » etc. (cf. supra, t. I, p. 137, note). Gilles Ménage écrit (Ménagiana, ap. Fertiault, les Amoureux du livre, p. 253) : « Entre tous les livres que l’on lit, il y en a beaucoup où l’on ne trouve presque rien de bon. En cela il faut imiter les abeilles ; elles voltigent sur toutes les fleurs, mais elles ne tirent pas de toutes de quoi faire du miel : « Apes in omnibus quærunt, non ex omnibus carpunt ». Et La Fontaine (Discours à Mme de la Sablière : Œuvres, t. IX, p. 186 ; Paris, Hachette, 1892. Collection des Grands Écrivains) :
    •  Papillon du Parnasse, et semblable aux abeilles
      A qui le bon Platon compare nos merveilles,
      Je suis chose légère, et vole à tout sujet ;
      Je vais de fleur en fleur, et d’objet en objet.

     Boileau (Discours au roi : Œuvres complètes, t. I, p. 33 ; Paris, Hachette, 1867) :

    •  Comme on voit au printemps la diligente abeille
      Qui du butin des fleurs va composer son miel,
      Des sottises du temps je compose mon fiel.

     J.-B. Rousseau (Odes, III. i, à M. le comte du Luc : Œuvres lyriques, p. 160 ; Paris, Dezobry, 1852) :

    •  Et, semblable à l’abeille en nos jardins éclose,
      De différentes fleurs j’assemble et je compose
      Le miel que je produis.

     André Chénier (Élégies, IV ; Poésies, p. 79; Paris, Charpentier, 1861) :

    •  Ainsi, bruyante abeille, au retour du matin,
      Je vais changer en miel les délices du thym.

     Et ces considérations d’Édouard Charton (1807-1890), (le Tableau de Cébès, notes, pp. 170-171 ; Paris, Hachette, 1882) : « … Ce pourrait être la devise des abeilles. S’il n’est pas inutile de chercher parmi les animaux, nos « frères inférieurs », comme les appelle Michelet, des exemples à suivre, je n’en connais aucun qui soit plus digne de notre attention que celui de l’abeille. L’œuvre de sa vie est excellente et d’une parfaite unité. Jamais le laborieux insecte ailé ne s’attarde sur les plantes d’où il n’a rien à tirer de bon ; il les fuit. Quelquefois, dans un intérêt d’observation scientifique, on a essayé de le tromper en plaçant sur son passage, dans les parterres, des fleurs artificielles semblables à celles qu’elle cherche ; non ! les abeilles ont plané au-dessus une seconde à peine : leur merveilleux instinct leur a fait découvrir aussitôt la supercherie. Il n’y avait rien là pour leur servir à faire leur miel, et elles n’avaient pas de temps à perdre. »
    Etc., etc.  ↩

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