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Le Livre, tome II, p. 252-268

Albert Cim, Le Livre, t. II, p. 252.
Albert Cim, Le Livre, t. II, p. 252 [268]. Source : Internet Archive.
Albert Cim, Le Livre, t. II, p. 253.
Pour suite de note : Albert Cim, Le Livre, t. II, p. 253 [269]. Source : Internet Archive.

du XIe arrondissement de Paris[252.1], et député sous le premier Empire, qui remplit de livres, de la cave aux mansardes, plusieurs maisons, cinq, dit l’un ; six, assure un autre ; et même huit, d’après un troi­sième[252.2]. Boulard, qui avait fait d’excellentes études,

[II.268.252]
  1.  Ce XIe arrondissement, dont la mairie se trouvait alors rue Mignon, maison Nyon, « était formé des divisions des Thermes, du Luxembourg, du Théâtre-Français (l’ancien), et du Pont-Neuf » ; il correspondait donc à peu près au VIe arrondissement actuel. Boulard a d’abord habité rue Saint-André-des-Arts, nº 27 (aujourd’hui nº 31) : c’est là qu’il était né le 5 septembre 1754. Il a demeuré ensuite rue des Petits-Augustins (actuellement rue Bonaparte), nº 21, au coin de la rue Visconti, où il est mort le 8 mai 1825. « C’est bien dans les limites du VIe arrondissement, cette terre d’élection des amateurs de bouquins, que devait naître, vivre, travailler et mourir Boulard. (Numa Raflin, loc. cit., p. 41, n. 1 ; p. 44 ; p. 48, n. 1 ; p. 51, n. 3 ; pp. 60 et 63.)  ↩
  2.  « Cinq, d’après Henry Berthoud ; huit, d’après Mary Lafon. » (Numa Raflin, loc. cit., p. 64, n. 3.) « Mon cher et honorable maître, M. Boulard, avait été un bibliophile délicat et difficile avant d’amasser dans six maisons à six étages six cent mille volumes de tous les formats, empilés comme les pierres des murailles cyclopéennes, c’est-à-dire sans chaux et sans ciment…. » (Charles Nodier, l’Amateur de livres, les Français peints par eux-mêmes, t. II, p. 84.) « Le vénérable Boulard enlevait tous les jours un mètre de raretés, toisé à sa canne de mesure, pour lequel ses six maisons pléthoriques de volumes n’avaient pas de place en réserve. » (Id., le Bibliomane, Contes de la Veillée, p. 271.) « Boulard achetait souvent des livres à la toise (c’était la mesure de longueur de l’époque) : il payait, en général, cent francs la toise. » (Henri Baillière, la Crise du livre, Bulletin mensuel de l’Association amicale des Commis libraires français, février 1904, p. 69.) Paul Dupont (Histoire de l’imprimerie, t. II, p. 174) ne parle, lui, que d’une seule maison, remplie de livres par Boulard : les autres, il est vrai, ont pu venir ensuite : « Propriétaire d’une vaste maison, quand le logement qu’il y occupait fut encombré, il donna successivement congé à tous ses locataires et transforma leurs appartements en dépôts de livres. »  ↩

Le Livre, tome II, p. 230-246

Albert Cim, Le Livre, t. II, p. 230.
Albert Cim, Le Livre, t. II, p. 230 [246]. Source : Internet Archive.
Albert Cim, Le Livre, t. II, p. 231.
Pour suite de note : Albert Cim, Le Livre, t. II, p. 231 [247]. Source : Internet Archive.

lectionneur Motteley (….-1850)[230.1]. il y a un demi-siècle, « Motteley, nous conte M. Firmin Maillard[230.2], était un amateur enragé et jaloux ; chaque porte de son appartement était garnie d’une serrure à secret, et la porte d’entrée, outre la serrure ordinaire, était encore agrémentée d’un énorme cadenas. Il recevait fort peu, n’aimant pas les visites, et se refusait obstinément de faire à sa demeure les réparations les plus urgentes, dans la crainte d’un contact imprévu, mais possible, entre des ouvriers aux mains blanches de plâtras et les superbes reliures de ses livres, lesquels furent seuls témoins de sa mort, qui arriva brusquement, au milieu de la nuit. Son cabinet valait bien cent mille francs, mais on ne découvrit chez lui qu’une somme à peine suffisante pour le faire enterrer. »

Motteley légua à l’État sa bibliothèque, riche en éditions elzéviriennes, en manuscrits à miniatures et en magnifiques reliures françaises et étrangères. Il eut soin, d’ailleurs, dans son testament[230.3], de bien spécifier que cette collection serait placée « dans une galerie ou salon portant cette inscription : Musée bibliographique formé par le bibliophile Motteley » ; et il exigea que le célèbre bibliophile Paul Lacroix[230.4] fût

[II.246.230]
  1.  Cf. Paul Dupont, op. cit., t. II, p. 175.  ↩
  2.  Op. cit., p. 139.  ↩
  3.  Cf. Paul Dupont, op. cit., t. II, p. 176.  ↩
  4.  Paul Lacroix, qui appelle Motteley « le bibliophile par excellence », a donné sur lui d’amusants détails dans la préface des Amoureux du livre de M. F. Fertiault, pp. xxiii et suiv. Voici l’une de ces anecdotes : « Le 24 février 1848, les révolutionnaires (ceux-là mêmes qui ont incendié la bibliothèque de Motteley dans le palais du Louvre, aux derniers soupirs de l’affreuse Commune de 1871) envahirent le Palais-Royal et commencèrent par jeter dans la cour du palais les livres de la Bibliothèque pour en faire un feu de joie. Motteley accourt ; ce n’est plus un bibliophile, c’est un lion, c’est un apôtre : Brûler des livres ! s’écrie-t-il. Vous n’êtes pas des hommes, vous êtes des bêtes brutes ! Vous ne savez donc pas lire ? » On s’empare de lui, on veut le coucher sur un bûcher de livres, auxquels on a mis le feu. « O Voltaire ! crie Motteley, ce ne sont plus les Parlements qui brûlent les livres ; c’est le bon peuple de Paris ! » L’invocation à Voltaire sauva Motteley et la Bibliothèque du Palais-Royal. »  ↩

Le Livre, tome II, p. 227-243

Albert Cim, Le Livre, t. II, p. 227.
Albert Cim, Le Livre, t. II, p. 227 [243]. Source : Internet Archive.
Albert Cim, Le Livre, t. II, p. 228.
Pour suite de note : Albert Cim, Le Livre, t. II, p. 228 [244]. Source : Internet Archive.

bibliothèque, un vieux monsieur à l’air fort pauvre, qui désirait lui parler. C’était M. Bryan. Il dit simplement : « Je voudrais revoir mes livres ». On le plaça devant ces belles reliures ; et, en feuilletant celle Notre-Dame de Paris et ce Paul et Virginie, il les regardait avec de tels yeux que M. de Heredia se demanda si le donateur ne rêvait pas de les reprendre. Mais non, il s’éloigna tranquillement. Deux jours plus tard, on apprenait qu’il s’était tué : avant de se donner la mort, il avait tenu à contempler une dernière fois ces livres qui avaient jadis tant réjoui ses yeux.

Une des plus singulières morts que les livres aient causées, c’est celle du marquis de Chalabre (xixe siècle), succombant au désespoir qu’il éprouvait de ne pouvoir se procurer un volume qui n’existait pas, une Bible, « qu’en un moment d’humour, avait inventée Charles Nodier[227.1] ».

[II.243.227]
  1.  Mouravit, op. cit., p. 28. Les bibliophiles ont été plus d’une fois à l’affut de livres introuvables, voire de livres imaginaires et imaginés. « L’heureux mortel qui ferait la trouvaille de l’Historique Description du solitaire et sauvage pays de Médoc, par feu M. de la Boëtie, conseiller du Roy en sa cour de Parlement, à Bordeaux, etc., etc. (Bordeaux, Millanges, 1593, in-12), deviendrait du coup presque célèbre et presque riche. Depuis plus d’un siècle et demi, on cherche cette Historique Description, dont l’existence même a été mise en doute. Le livre est pourtant mentionné, avec son titre très détaillé, dans la Bibliothèque historique. » (Revue bibliographique belge, 1902, citée par le Journal de la Jeunesse, 13 septembre 1902, Supplément.) A propos du marquis de Chalabre, je glane cette anecdote dans l’Histoire de l’imprimerie, de Paul Dupont (t. II, p. 177) : « … Le marquis de Chalabre avait légué sa bibliothèque à Mlle Mars. Cette bibliothèque était réellement du plus grand prix, mais Mlle Mars lisait peu ou plutôt ne lisait pas du tout. Elle chargea Merlin, son ami, de classer les livres du défunt et d’en faire la vente. Merlin s’acquitta de cette mission en toute conscience ; il feuilleta et refeuilleta si bien chaque volume, qu’un jour il entra dans la chambre de Mlle Mars, tenant trente à quarante billets de mille francs, qu’il déposa sur une table. « Qu’est-ce que cela, Merlin ? demanda Mlle Mars. — Je ne sais, Mademoiselle, dit celui-ci. — Comment, vous ne savez ? Mais ce sont des billets de banque. — Sans doute. — Où donc les avez-vous trouvés ? — Mais dans un portefeuille pratiqué sous la couverture d’une Bible très rare. Comme la Bible était à vous, les billets de banque sont aussi à vous. » Mlle Mars prit les billets de banque, qui, en effet, étaient bien à elle, et eut grand peine à faire accepter à Merlin, en cadeau, la Bible dans laquelle les billets de banque avaient été trouvés. Quant aux autres livres, auxquels il semble que cette aubaine inattendue aurait dû servir de rançon, ils n’en furent pas moins vendus aux enchères et à beaux deniers comptants, au profit de la légataire. »  ↩