Mot-clé : « Daguesseau (chancelier) »

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Le Livre, tome I, p. 253-277

Albert Cim, Le Livre, t. I, p. 253.
Albert Cim, Le Livre, t. I, p. 253 [277]. Source : Internet Archive.

pour les Vies des hommes illustres de Plutarque, et il faisait de quelque tome de cet ouvrage son compagnon de promenade habituel.

Jonathan Swift (1667-1745), l’auteur des Voyages de Gulliver, avait pris « l’amère habitude de relire, chaque fois que l’année ramenait le jour de sa naissance, le chapitre de l’Écriture où Job déplore la sienne, et maudit cette nuit fatale où l’on annonça dans la maison de son père qu’un enfant mâle était né ». Ce qui n’empêchait pas cet impitoyable pessimiste de déclarer que « la meilleure méthode, en cette vie, est de prendre son café quand on le peut, et de s’en passer gaiement quand on ne le peut pas[253.1] ».

Saint-Hyacinthe, l’auteur du Chef-d’œuvre d’un inconnu (1684-1746), disait que, pour former une excellente bibliothèque, il ne faut que joindre les ouvrages de Plutarque à ceux de Platon et de Lucien, les livres de ces trois hommes devant être regardés comme la source de la sagesse, du savoir, et des grâces en tous genres. Pour l’étude des mœurs modernes, il ajoutait à ces trois noms celui de La Bruyère.

Le chancelier Daguesseau (1668-1751) ne passait jamais un jour sans ouvrir l’Écriture sainte[253.2]. Il esti-

[I.277.253]
  1.  Prévost-Paradol, Jonathan Swift, sa vie et ses œuvres, en tête des Voyages de Gulliver, t. I, pp. 8 et 39. (Paris, Bibliothèque nationale, 1868.)  ↩
  2.  Peignot, op. cit., t. I, p. 215.  ↩

Le Livre, tome I, p. 159-183

Albert Cim, Le Livre, t. I, p. 159.
Albert Cim, Le Livre, t. I, p. 159 [183]. Source : Internet Archive.
Albert Cim, Le Livre, t. I, p. 160.
Pour suite de note : Albert Cim, Le Livre, t. I, p. 160 [184]. Source : Internet Archive.

tiles, ou ne sont pas du moins aussi utiles qu’elles le devraient être, parce que, faule de notions suffisantes, on ignore ce qu’il faut remarquer, et qu’on ne sent pas la conséquence d’une partie des choses qu’on lit. » De là, la nécessité de relire tous ces chefs-d’œuvre qu’on n’a fait qu’entrevoir, ou plutôt que méconnaître, durant les années scolaires.

C’est Daguesseau qui, lisant je ne sais quel poème grec avec le savant Boivin, eut ce mot charmant, pour exprimer le plaisir qu’il éprouvait : « Hâtons-nous ! Si nous allions mourir avant d’avoir achevé[159.1] ! »

[I.183.159]
  1.  Thomas, Éloge de Daguesseau, ap. Daguesseau, Œuvres complètes, t. I, p. xcii, notes (Paris, Fantin, 1819). Je trouve dans les mêmes notes (pp. xci et suiv.) les renseignements suivants relatifs au chancelier Daguesseau : « Il savait la langue française par principes, le latin, le grec, l’hébreu, l’arabe et d’autres langues orientales, l’italien, l’espagnol, l’anglais et le portugais. On pouvait dire de lui qu’il était contemporain de tous les âges, et citoyen de tous les lieux ; il n’était étranger dans aucun pays ni dans aucun siècle…. Il avait une mémoire prodigieuse ; il lui suffisait, pour retenir, d’avoir lu une seule fois avec application. Il n’avait point appris autrement les poètes grecs, dont il récitait souvent des vers et des morceaux entiers. A l’âge de quatre-vingt-un ans, un homme de lettres ayant cité peu exactement devant lui une épigramme de Martial, il lui en récita les propres termes, en avouant qu’il n’avait pas vu cet auteur depuis l’âge de douze ans. II retenait quelquefois ce qu’il avait seulement entendu lire. Boileau lui ayant un jour récité une de ses pièces qu’il venait de composer, M. Daguesseau lui dit tranquillement qu’il la connaissait, et sur-le-champ la lui répéta tout entière. Le satirique, comme on s’en doute bien, commença par entrer en fureur, et finit par admirer…. M. Daguesseau ne connut jamais les plaisirs et ce qu’on appelle amusements ; son principe était qu’il n’est permis de se délasser qu’en changeant d’occupations. Il ne faisait aucun voyage, même à Versailles, sans lire ou se faire lire en chemin quelque ouvrage…. Il ne demanda, ne désira jamais aucune charge ; les honneurs vinrent le chercher. Au commencement de la Régence, lorsqu’il n’était encore que procureur général, il refusa de faire des démarches pour son élévation, quoiqu’il fût presque assuré du succès : « A Dieu ne plaise, dit-il, que j’occupe jamais la place d’un homme vivant ! » « Il n’aspirait qu’à être utile ; et, pendant soixante ans passés dans les premières charges de l’État, il n’eut pas même la pensée qu’il pouvait s’enrichir ; il aurait cru que c’était vendre ses services…. Il n’a laissé d’autres fruits de ses épargnes que sa bibliothèque, encore n’y mettait-il qu’une certaine somme par an. Son esprit, solide dans tous les goûts, n’aimait que les livres utiles ; il méprisait ceux qui n’étaient que rares…. M. Daguesseau mourut le 9 février 1751. Il porta, même au delà du tombeau, l’horreur du luxe, et la simplicité qui fît son caractère. Il voulut que ses cendres fussent mêlées et confondues parmi celles des pauvres, dans le cimetière de la paroisse d’Auteuil, où son épouse était enterrée. »  ↩

Le Livre, tome I, p. 158-182

Albert Cim, Le Livre, t. I, p. 158.
Albert Cim, Le Livre, t. I, p. 158 [182]. Source : Internet Archive.

belles et stoïques paroles : « Je n’aurais guère profité de mes livres, si je n’avais appris d’eux à m’en passer[158.1] ».

Le chancelier Daguesseau (1668-1751), autre ami de Boileau et autre passionné des lettres, des sciences et des livres, a laissé, dans ses Instructions adressées à son fils sur les études propres à former un magistrat, plus d’un utile conseil sur l’ « Étude de l’histoire », sur « Ce qu’il faut lire », l’ « Ordre dans lequel il faut lire l’histoire », et aussi sur la « Manière de faire des extraits ou des collections », l’ « Étude des Belles-Lettres », etc.[158.2]. « Tout se réduit, disait-il, ou à lire ce que les autres ont écrit, ou à écrire des choses dignes d’être lues : Aut scripta legere, aut scribere legenda[158.3] ». « Il arrive souvent, observe-t-il encore[158.4], que la plupart des lectures de la jeunesse, quoique faites avec goût et avec application, sont presque inu-

[I.182.158]
  1.  Cf. Charles Nodier, Mélanges tirés d’une petite bibliothèque, Préface, p. iii ↩
  2.  Voir Daguesseau, Œuvres choisies. (Paris, Didot, 1871.)  ↩
  3.  Op. cit., p. 293.  ↩
  4.  Op. cit., p. 263.  ↩

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