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Mot-clé : « Claretie (Jules) »

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Le Livre, tome I, p. 221-245

Albert Cim, Le Livre, t. I, p. 221.
Albert Cim, Le Livre, t. I, p. 221 [245]. Source : Internet Archive.

Parlant de ses livres et du bonheur qu’il goûte au milieu d’eux, M. Jules Claretie (1840-….)[221.1] fait cette très belle profession de foi : « J’aime les Lettres, je les aime uniquement, profondément, passionnément, et je les aime par-dessus tout. Je les aime sous toutes leurs formes, avec toutes leurs luttes, toutes leurs rancœurs, tous leurs déboires. Elles consolent même des tristesses qu’elles font naître, comme cette lance d’Achille qui guérissait les blessures qu’elle pouvait faire. « La littérature mène à tout, disait Villemain, à la condition qu’on en sorte. » Quel paradoxe ! La littérature peut ne mener à rien, mais elle rendra heureux jusqu’à la fin celui qui l’adore, à la condition qu’il n’en sorte jamais. »

Les Lettres, Prévost-Paradol (1829-1870) les a, lui aussi, chantées et glorifiées, et son pané­gyrique[221.2] est un des plus justement et universellement renommés : « Salut, Lettres chéries, douces et puissantes consolatrices ! Depuis que notre race a commencé à balbutier ce qu’elle sent et ce qu’elle pense, vous avez comblé le monde de vos bienfaits ; mais le plus grand de tous, c’est la paix que vous pouvez répandre dans nos âmes. Vous êtes comme ces sources limpides, cachées à deux pas du chemin

[I.245.221]
  1.  Causerie sur ma bibliothèque, Annales littéraires des bibliophiles contemporains, 1890, p. 21.  ↩
  2.  Péroraison d’une courte étude sur le poète Lucrèce, Essais de politique et de littérature, 2e série, p. 180. (Paris, Michel Lévy, 1863.)  ↩

Le Livre, tome I, p. 204-228

Albert Cim, Le Livre, t. I, p. 204.
Albert Cim, Le Livre, t. I, p. 204 [228]. Source : Internet Archive.

je me rattache aux Lettres seules, le plus sûr des amours. Mais je n’en sépare pas ce qui en fait la force et l’honneur, je veux dire le sérieux et le vrai de la pensée[204.1]. »

Un secrétaire de Sainte-Beuve, l’érudit et fin critique Jules Levallois (1829-1903)[204.2], l’auteur de Cri-

[I.228.204]
  1.  Sainte-Beuve, Correspondance, t. II, p. 228.  ↩
  2.  « Après lui [M. Octave Lacroix], j’eus presque immédiatement pour secrétaire un homme, très jeune alors, et dont le nom, aujourd’hui bien connu, est, à lui seul, un éloge. M. Jules Levallois… » [Sainte-Beuve, Nouveaux Lundis, t. IV, p. 460, Appendice (1865)]. « … Un jeune écrivain, M. Jules Levallois, qui unit le goût vif des arts au sentiment des Lettres…. » (Id., Port-Royal, livre VI, t. V, p. 477, note.) « Jules Levallois… l’un des plus éminents critiques du xixe siècle. » (Jules Troubat, Sainte-Beuve intime et familier, p. 14. Paris, L. Duc, 1903. In-8, 31 pp.) « … Il y eut une heure où Jules Levallois, qui n’était plus, depuis des années, qu’un philosophe résigné, fut une puissance en littérature. Adolphe Guéroult, le fondateur de l’Opinion nationale, qui se connaissait en hommes, l’avait chargé de la critique littéraire dans son journal, et Jules Levallois fut là pour les livres ce que Francisque Sarcey fut pour les théâtres. Les « Variétés littéraires » de Levallois étaient aussi lues dans le corps du journal que la « Causerie dramatique » au bas du feuilleton. Et, pour toute une génération, consacrée aujourd’hui par la gloire, pour les Goncourt, pour Zola, pour Daudet, Jules Levallois fut « le bon juge », et, à ses heures, mérita d’être — alors que Schérer et Montégut écrivaient encore — regardé comme le successeur direct de Sainte-Beuve, dont il avait été le secrétaire…. Jules Levallois était un esprit supérieur que hantaient les problèmes de la destinée humaine ; mais… c’était aussi un esprit charmant, très brillant et très gai, qui séduisait tous ceux qui l’approchaient. » (Jules Claretie, le Figaro, 18 septembre 1903. Un secrétaire de Sainte-Beuve.)  ↩

Le Livre, tome I, p. 198-222

Albert Cim, Le Livre, t. I, p. 198.
Albert Cim, Le Livre, t. I, p. 198 [222]. Source : Internet Archive.
Albert Cim, Le Livre, t. I, p. 199.
Pour suite de note : Albert Cim, Le Livre, t. I, p. 199 [223]. Source : Internet Archive.

lettré ne peut se dispenser d’avoir sous la main[198.1], » a fait la remarque suivante :

[I.222.198]
  1.  E. Ledrain, l’Illustration, 26 novembre 1904, p. 367. « Sainte-Beuve, le plus vaste tempérament littéraire qu’on ait vu depuis Gœthe, » a dit Auguste Vitu (ap. Charles Monselet, Mes souvenirs littéraires, p. 164). « Sainte-Beuve, c’est-à-dire le plus accompli de tous les critiques, celui qui a su précisément atteindre, dans le développement du genre, ce point unique de perfection après lequel, l’idéal étant réalisé, il n’y a plus qu’exagération ou faiblesse, les témérités infécondes de la « critique scientifique », ou le retour en arrière à un dogmatisme littéraire également stérile. » (Paul Stapfer, Des réputations littéraires, t. I, p. 142.) « Taine a eu raison quand il a proclamé Sainte-Beuve, en notre temps, un des cinq ou six serviteurs les plus utiles de l’esprit humain ; Weiss a dit vrai quand il affirma que, depuis Gœthe, notre siècle n’a pas produit de plus grand critique et qu’il a produit bien peu d’aussi grands esprits. Prenez un volume au hasard, dans cette œuvre vraiment prodigieuse par le travail, par le savoir et par le talent ; vous y trouverez certainement, sur un auteur ancien ou moderne, grave ou léger, étranger ou national, qu’il soit orateur ou historien, mémorialiste ou conteur, philosophe ou dramaturge, prosateur ou poète, un jugement original, des points de vue nouveaux, cent détails curieux, rares, toujours exacts et scrupuleusement contrôlés…. Mais surtout, on ne saurait trop le redire, quelle étendue de connaissances ! quelle variété inouïe ! Sainte-Beuve sait tout, goûte et pénètre tout. Rien ne le surprend…. » (François Coppée, Discours prononcé à Paris le 19 juin 1898, lors de l’inauguration du monument de Sainte-Beuve au Luxembourg, Revue encyclopédique, 9 juillet 1898, p. 641.) « … Avec les Causeries du lundi, et les Nouveaux Lundis, Sainte-Beuve poursuivait, pendant près de vingt ans, chaque semaine, un cours de littérature universelle. Et quel cours ! le plus souple, le plus vivant, le plus nourri. Bénédictin laïque, Sainte-Beuve… » etc. (Gustave Larroumet, Discours prononcé à Paris le 19 juin 1898, ibid.) « … On pourrait appeler Sainte-Beuve le Balzac de la critique…. Sainte-Beuve reconstitue la comédie humaine d’autrefois, avec l’infinie variété de ses épisodes et de ses types. Il en rappelle un à un les acteurs, les témoins ; il les interroge, il les étudie séparément, et il réussit à vous léguer une œuvre sans précédent, un trésor de monographies, une immense galerie de portraits où l’histoire revit dans ses personnages, et chacun de ces portraits a le fini d’une miniature, avec la fermeté d’un tableau de maître ; c’est le triomphe d’un art consommé et sûr, patient, contenu, tout en nuances ; exquis dans sa discrétion. » (Albert Vandal, Discours prononcé à Paris le 19 juin 1898, ibid., p. 642.) « Sainte-Beuve… ce cerveau encyclopédique, égal à celui d’un Gœthe, a laissé une œuvre que doivent consulter page à page tous ceux qui, après lui, veulent reprendre les sujets qu’il a traités…. Il fut, en vérité, le plus compréhensif des juges, des divinateurs d’âmes…. Naturaliste de génie, rien ne lui semblait à dédaigner dans la nature, et toujours il chercha la vérité, l’âpre vérité, disait Stendhal…. » (Jules Claretie, Discours prononcé à Boulogne-sur-Mer le 18 décembre 1904, le Temps, 19 décembre 1904.) C’est Sainte-Beuve qui, parvenu presque au terme de son existence, enregistrait et signait cet aveu plein de sagesse : « Je sens mieux de jour en jour combien il faut savoir de choses pour parler de n’importe quoi sans dire une bêtise ! » (Nouveaux Lundis, t. VIII, p. 497, Errata.)  ↩

Le Livre, tome I, p. 197-221

Albert Cim, Le Livre, t. I, p. 197.
Albert Cim, Le Livre, t. I, p. 197 [221]. Source : Internet Archive.

« Au catalogue de ses livres, écrivait un jour Jules Janin (1804-1874), on connaît un homme. Il est là dans sa sincérité ; voilà son rêve, et voilà ses amours[197.1]. »

Et Richardson (1689-1761), dans son roman de Clarisse Harlowe[197.2] : « Si vous avez intérêt de connaître une jeune personne, commencez par connaître les livres qu’elle lit ». « Il n’y a rien de si incontestable, ajoute Joseph de Maistre (1754-1821), en citant ce pas­sage[197.3]…. Il est certain qu’en parcourant les livres rassemblés par un homme, on connaît en peu de temps ce qu’il est, ce qu’il sait et ce qu’il aime[197.4]. »

Notre grand historien littéraire Sainte-Beuve (1802-1869), l’auteur de ces admirables Causeries du lundi qu’on a si justement qualifiées d’ « Encyclopédie des Lettres[197.5] », de « trésor inépuisable, que tout

[I.221.197]
  1.  Ap. Uzanne, Nos amis les livres, xi, p. 269.  ↩
  2.  Ap. Peignot, Manuel du bibliophile, t. I, p. 19.  ↩
  3.  Ap. Peignot, op. cit., t. I, pp. 19-20.  ↩
  4.  A cette série d’affirmations, il est bon d’opposer la légitime restriction de M. Jules Claretie (Causeries sur ma bibliothèque, dans les Annales littéraires des bibliophiles contemporains, 1890, p. 5) : « Dis-moi ce que tu lis, je te dirai qui tu es. L’axiome peut être vrai pour un particulier qui choisit selon ses goûts, pour un amateur qui se compose une bibliothèque comme on composerait un bouquet…. Mais la vérité n’est plus stricte lorsqu’il s’agit d’un homme de lettres, tenu à tout garder, après avoir tout lu. »  ↩
  5.  Jules Claretie, le Figaro, 18 septembre 1903.  ↩