et l’autre. Il faut choisir d’abord les livres qui nous servent d’instituteurs, de guides et de maîtres ; ce n’est qu’après avoir bien profité de ceux-là que nous pourrons nous attacher à d’autres comme à des amis, à des amis de tous les jours et de tous les instants, parce qu’il n’y a que ceux-là dont l’amitié nous rende vraiment heureux. »
Puis cette très remarquable lettre de Thomas Carlyle (1795-1881) « à un jeune homme sur le choix de ses lectures », lettre célèbre en Angleterre, dit Édouard Charton, qui l’a publiée dans les notes de son Tableau de Cébès[128.1], et que, vu son importance, je reproduis ici in extenso :
« Ce serait pour moi une véritable satisfaction de pouvoir seconder, par mes conseils, les généreux efforts que vous faites en vue de votre amélioration personnelle ; malheureusement une longue expérience m’a convaincu que les conseils ont, en général, peu d’utilité, et en voici la principale raison : c’est qu’il est très rare, pour ne pas dire impossible, que les conseils soient bien donnés, aucun homme ne pouvant connaître assez parfaitement l’état d’esprit d’un autre pour se mettre à sa place ; en sorte que c’est presque toujours à un personnage imaginaire que s’adresse le conseiller le plus sensé et le mieux intentionné.
- Édouard Charton, le Tableau de Cébès, Souvenirs de mon arrivée à Paris, pp. 150-154. (Paris, Hachette, 1882 ; in-12.) ↩