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Mot-clé : « Balzac (H. de) »

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Le Livre, tome III, p. 106-120

Albert Cim, Le Livre, t. III, p. 106.
Albert Cim, Le Livre, t. III, p. 106 [120]. Source : Internet Archive.

D’après les détails qui précèdent, et que nous aurions pu développer et compléter bien davantage, on voit comme cette question des formats est ardue et compliquée, combien elle est embarrassante. C’est au point que nombre d’éditeurs et de libraires, tantôt par ignorance, tantôt même pour ne pas dérouter le public et l’induire en erreur en lui énonçant la vérité, attribuent à leurs livres d’inexactes désignations de format[106.1].

Les bibliographes modernes ont fréquemment protesté et ne cessent de protester contre ces usages et ces termes surannés. Le docteur Graesel écrit dans son Manuel de bibliothéconomie[106.2] :

« Depuis que, grâce à l’emploi de la machine, on est arrivé à donner au papier des dimensions considérables, les dénominations traditionnelles employées jusqu’ici ont perdu leur raison d’être, une feuille repliée trois ou quatre fois pouvant encore produire un format correspondant, comme dimensions, à ce

[III.120.106]
  1.  Un exemple entre mille et mille : H. de Balzac, le Médecin de campagne ; Paris, Librairie nouvelle, 1858. Au dos de la couverture, ce volume — ainsi que tous ceux de la « Bibliothèque nouvelle » dont il fait partie — est annoncé comme étant du format in-18, et il suffit de l’ouvrir à la page 17 (qui porte la signature 2), à la page 33 (qui porte la signature 3), etc., pour constater qu’il est de format in-16.  ↩
  2.  Page 197.  ↩

Le Livre, tome III, p. 055-069

Albert Cim, Le Livre, t. III, p. 55.
Albert Cim, Le Livre, t. III, p. 55 [069]. Source : Internet Archive.
Albert Cim, Le Livre, t. III, p. 56.
Pour suite de note : Albert Cim, Le Livre, t. III, p. 56 [070]. Source : Internet Archive.

et l’aspect de l’ancien vélin véritable, provenant de la peau de jeunes veaux, est un papier sans grain, très uni, lisse et satiné, excellent pour le tirage des vignettes. C’est au célèbre et si original imprimeur anglais John Baskerville (1706-1775) qu’est due l’invention du papier vélin ; elle remonte à 1750, et le premier ouvrage tiré sur cette sorte de papier fut une édition de Virgile, datée de 1757 et publiée par Basker­ville[055.1]. D’une façon générale, tout papier fabriqué à la forme, tout papier « de cuve », dépourvu de grains et de vergeures, est qualifié de vélin[055.2].

Le papier de Chine se fabrique avec l’écorce du bam­bou[055.3]. Il a une teinte grise ou jaunâtre, un aspect

[III.069.055]
  1.  Cf. Louis Figuier, op. cit., p. 205 ; et Ambroise Firmin-Didot, op. cit., col. 686. En France, le papier vélin fut employé pour la première fois, en 1780, par MM. Johannot (cf. Gabriel Peignot, Manuel du bibliophile, t. II, p. 428).  ↩
  2.  On rencontre fréquemment, dans les catalogues et annonces de librairie, cette locution : « papier de cuve du Marais », « vélin de cuve des fabriques du Marais ». Ce n’est pas à Paris, dans le quartier du Marais, comme certains se l’imaginent, que se trouvent ces fabriques de papier à la forme, mais dans le département de Seine-et-Marne, sur la rivière du Grand-Morin, près et en aval de Jouy-sur-Morin, au lieudit « le Marais ». Non loin de là, sur la rivière du Petit-Morin, en amont de la Ferté-sous-Jouarre, au lieudit « le Gouffre » ou « Usine de Biercy », se trouve une autre papeterie à la forme, qui appartient à la Banque de France, et où elle fait fabriquer le papier de ses billets.  ↩
  3.  « Inventeurs du papier, les Chinois en préparent plusieurs espèces qui manquent à l’Europe ; cependant eux-mêmes donnent toujours la préférence aux papiers coréens et japonais. Dès l’année 153 de l’ère vulgaire, Tsaïloun avait enseigné à ses compatriotes l’art de remplacer les tablettes en bambou par du papier, dont les écorces d’arbre, le fil de chanvre, les vieilles toiles, les filets de pêche lui fournissaient la pâte. Depuis cette époque, on emploie aussi pour la fabrication du papier, les jeunes pousses de bambou, le rotin, les algues marines, le glaïeul, la fibre du broussonetia papyrifera, les cocons de vers à soie. » (Élisée Reclus, Nouvelle Géographie universelle, t. VII, pp. 583-584.) Voir aussi, sur le papier de Chine, H. de Balzac, Illusions perdues, t. I, les Deux Poètes, pp. 116-118 (Paris, Librairie nouvelle, 1857). « Un inventeur de génie, Tsaï-lun (Tsaïloun), fabriqua le premier, en Chine, vers l’année 153 après Jésus-Christ, le papier proprement dit…. Le nom de Tsaï-lun est populaire dans le Céleste Empire. Un temple lui a été élevé, et, plus de mille ans après sa mort, on lui offrait des sacrifices. » (Louis Figuier, op. cit., pp. 177-178.)  ↩

Le Livre, tome II, p. 307-323

Albert Cim, Le Livre, t. II, p. 307.
Albert Cim, Le Livre, t. II, p. 307 [323]. Source : Internet Archive.

thèque. Il avait très peu lu dans son enfance, et souvent il disait à ses amis : « Depuis l’âge de seize ans je n’ai pas ouvert un livre ». Il a dit encore : « Si j’avais lu autant de livres que tels et tels, je serais aussi ignorant qu’ils le sont[307.1] ».

« Les génies [hommes de génie] lisent peu, pratiquent beaucoup et se font d’eux-mêmes, » affirmait Diderot[307.2]. Ce qui est en complet désaccord avec l’assertion si « intré­pide[307.3] », si téméraire d’Emerson, que nous avons vue citée par Jules Levallois : « Les hommes de génie doivent être de grands liseurs ».

Il y a même eu des gens de lettres partisans de la destruction des livres.

Dans le Mercure du 15 février 1794, le critique La Harpe (1739-1803), ci-devant membre de l’Académie française, et pour le quart d’heure fougueux démagogue, en attendant qu’il devînt aristocrate forcené, se contente de demander qu’on supprime les armoiries « des tyrans » sur les plats des volumes de la Bibliothèque nationale, qu’on fasse disparaître

[II.323.307]
  1.  Fertiault, les Amoureux du livre, p. 358.  ↩
  2.  Ap. Albert Collignon, la Religion des Lettres, p. 359.  ↩
  3.  « Emerson, avec cette intrépidité d’assertion qui le caractérise…. » (Jules Levallois : cf. supra, chap. iv, p. 135). D’autre part. — et pour tâcher de faire entendre tous les sons, — H. de Balzac a noté que « les grands conteurs : Ésope, Lucien, Boccace, Rabelais, Cervantes, Swift, La Fontaine, Lesage, Sterne, Voltaire, Walter Scott, les Arabes inconnus des Mille et une Nuits, sont tous des hommes de génie autant que des colosses d’érudition ». (Petites Misères de la vie conjugale, p. 164 ; Paris, Librairie nouvelle, 1862.)  ↩

Le Livre, tome II, p. 201-217

Albert Cim, Le Livre, t. II, p. 201.
Albert Cim, Le Livre, t. II, p. 201 [217]. Source : Internet Archive.
Albert Cim, Le Livre, t. II, p. 202.
Pour suite de note : Albert Cim, Le Livre, t. II, p. 202 [218]. Source : Internet Archive.

après avoir prédit qu’ « on tuera la presse comme on tue un peuple, en lui donnant la liberté, » il conclut : « Si la presse n’existait pas, il faudrait ne pas l’inventer[201.1] ».

Mais elle existe, et plus vivace et plus forte que jamais, de plus en plus puissante[201.2]. Pour quantité de gens, pour la grande majorité des lecteurs, il n’y a pas d’autre lecture que celle des journaux, — c’est-à-dire, en somme et d’ordinaire, la lecture de faits accidentels et fugitifs, de futiles contingences. « Lorsque, pendant quelques mois, observe Gœthe[201.3], on n’a pas lu les journaux, et qu’on les lit tous de suite en une fois, on voit alors combien on perd de temps avec ces papiers[201.4]. »

[II.201.217]
  1.  Monographie de la presse parisienne. (Balzac, Œuvres complètes, t. XXI, pp. 366, 434, et passim ; Paris, Lévy, 1870 ; in-8.)  ↩
  2.  Sur la puissance de la presse. L’omnipotence du journalisme, voir la lettre du 12 avril 1839 des Lettres parisiennes de Mme Émile de Girardin (1804-1855 : Le vicomte de Launay, t. I, pp. 324-325 ; Paris, Librairie nouvelle, 1856) : « … Ils (les flatteurs) ont porté leur hommage au dieu du jour, à celui qui donne la renommée, à celui qui consacre la vertu, à celui qui improvise le génie, à celui qui paye l’apostasie, à celui qui vend la popularité, au journalisme ! Et les journalistes ont pour flatteurs tout le monde : tous ceux qui écrivent, tous ceux qui parlent, tous ceux qui chantent, tous ceux qui dansent, tous ceux qui pleurent, tous ceux qui aiment, tous ceux qui haïssent, tous ceux qui vivent enfin ! Le journalisme ! Voilà votre roi, messieurs, et vous êtes tous ses courtisans. » Etc.  ↩
  3.  Conversations recueillies par Eckermann, trad. Délerot, t. II, p. 181.  ↩
  4.  « A l’instar de la presse américaine, on a commencé de donner, dans le journal, aux faits les plus insignifiants l’importance la plus démesurée. Des faits dont aucun journal n’aurait cru utile de parler, il y a dix ans, à cause de leur extrême banalité, occupent aujourd’hui, dans les colonnes de certains de nos quotidiens, une place première, considérable. Tel accident de voiture, qu’autrefois on n’aurait même pas mentionné ou qu’on eût raconté en trois lignes, fournit aujourd’hui un article tout entier. Remarquez quelle importance démesurée prend le moindre fait. Des centaines de journaux publient à la fois cet article ; ils le commentent, l’amplifient. Et, pendant une semaine souvent, il n’est pas question d’autre chose : ce sont, chaque matin, de nouveaux détails : les colonnes s’emplissent, chaque feuille tâche de pousser au tirage, s’évertuant à satisfaire davantage la curiosité de ses lecteurs. Le procédé que l’on emploie d’habitude pour grossir l’importance d’une nouvelle se réduit à des artifices typographiques, et il suffit de multiplier titres, sous-titres, alinéas et passages en gros caractères pour que quelques infiltrations d’eau, venues de la rivière voisine, à travers les murs lézardés d’une cave, prennent les proportions d’une inondation, et qu’une brouette renversée devienne une catastrophe comparable à un déraillement de chemin de fer. Une armée de reporters se tient en faction dans les gares, s’embusque jusque dans les corridors d’hôtel, ou se faufile dans les clubs à la mode, et, à défaut de personnages célèbres, interroge à outrance, avec rage, de malheureux excursionnistes à peine connus de l’agence Cook. Le même système de grossissement est appliqué aux dépêches, et de partout arrivent des télégrammes qui transforment le plus vulgaire fait divers en un drame tout hérissé d’émouvantes péripéties. Quel est le fauteur de ces niaiseries ainsi produites et qui sont si nuisibles à l’ordre et à la marche du journal ? Est-ce le journal ? Est-ce le public qui le lui demande ? Ils s’enfièvrent mutuellement, voilà ce qui reste de plus clair. » (Baron Tanneguy de Wogan, Manuel des gens de lettres, pp. 96-97.)  ↩

Le Livre, tome II, p. 200-216

Albert Cim, Le Livre, t. II, p. 200.
Albert Cim, Le Livre, t. II, p. 200 [216]. Source : Internet Archive.

Misérables musiciens, qui torturent un instrument admirable pour en tirer des sons aigres et faux, au lieu de lui faire rendre de divins accords !… »

Thiers (1797-1877) estime tout crûment, lui, que « la presse est une mauvaise denrée ; la meilleure ne vaut pas le diable[200.1] ».

Et Proudhon (1809-1865)[200.2] : « Est-ce par les journaux que nous connaîtrons l’opinion parisienne ? Mais… pour qui a vu de près ces diverses officines, toute considération tombe à l’instant. »

« Le journalisme est un enfer, un abîme d’iniquités, de mensonges, de trahisons…. un de ces lupanars de la pensée…. S’il existait un journal des bossus, il prouverait, soir et matin, la beauté, la bonté, la nécessité des bossus…. Le journal servirait son père tout cru à la croque au sel de ses plaisanteries, plutôt que de ne pas intéresser ou amuser son public…. Le journalisme sera la folie de notre temps. »

Telle était l’opinion de Balzac (1799-1850)[200.3]. Et,

[II.216.200]
  1.  Ap. Dr Véron, Mémoires d’un bourgeois de Paris, t. V, p. 293. (Paris, Librairie nouvelle, 1856.)  ↩
  2.  De la capacité politique des classes ouvrières, p. 236.  ↩
  3.  Illusions perdues, t. I, pp. 243, 244, 334, 335 ; t. II, p. 193, et passim. (Paris, Librairie nouvelle, 1858 et 1865.) Cf. ce que dit M. Edmond Thiaudière (1837-….), dans son recueil de pensées, la Soif du juste (p. 175) : « Ce qui montre à quel degré d’abjection est descendue la Société de notre temps, c’est que le journalisme contemporain trouve son intérêt à mettre en relief surtout ce qui est infâme et ce qui est inepte ».  ↩

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