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Le Livre, tome III, p. 037-051

Albert Cim, Le Livre, t. III, p. 37.
Albert Cim, Le Livre, t. III, p. 37 [051]. Source : Internet Archive.
Albert Cim, Le Livre, t. III, p. 38.
Pour suite de note : Albert Cim, Le Livre, t. III, p. 38 [052]. Source : Internet Archive.

ces énormes rouleaux dont la longueur atteint jusqu’à 5 000 mètres, que les presses rotatives de Marinoni se chargeront de noircir. L’opération s’accomplit toute seule. Un unique ouvrier y assiste, accoudé contre un bâti ; il se penche parfois sur lui cylindre, examine le papier, serre un écrou, verse un peu d’huile, puis rentre dans son immobilité, type expressif du travail moderne.

« De pareilles machines produisent 12 000 kilos par vingt-quatre heures : on en a construit qui atteignent 18 000 kilos ; leur grandeur, leur vitesse, tendent à augmenter sans cesse[037.1]…. »

[III.051.037]
  1.  G. d’Avenel, op. cit., p. 59. « Les directeurs d’une grande papeterie d’Eisenthal, voulant se rendre compte du temps mis pour transformer un arbre en journal prêt à être lu, ont exécuté ce qui suit : A 7 h. 35 du matin, trois arbres étaient abattus dans la forêt voisine, portés à la fabrique, après avoir été écorcés. La pâte de bois liquide fut conduite jusqu’aux machines, et, à 9 h. 34. la première feuille était livrée. L’imprimerie d’un quotidien était située à 4 kilomètres de là, et, portée par une automobile, la feuille fut mise un instant après sous presse. A 10 heures du matin, elle paraissait imprimée. » (La Construction pratique, dans l’Informateur des Gens de lettres, 30 octobre 1904, p. 264.) Voici, sur cette question du défrichement des forêts et de leur transformation en papier, quelques autres renseignements statistiques, empruntés à la Nature (27 mars 1897, p. 270) : « Dans un volume de l’ « Encyclopédie Léauté », les Succédanés du papier, M. V. Urbain, répétiteur à l’École centrale, montre avec quelle intensité on défriche pour se procurer la pâte à papier. Pendant le cours de l’année 1895, dit-il, on a constaté que la France et l’Angleterre avaient manufacturé plus de 400 000 tonnes de pâte chimique, avec des bois importés de Suède et de Norvège. Ce chiffre doit attirer l’attention des économistes, car il représente le rendement en cellulose de pins ou de sapins âgés de trente ans au moins. Un pin de trente-cinq à quarante ans, de belle venue, ne cube pas plus de 1 mètre cube. Lorsqu’il aura été ébranché, écorcé, etc., il ne pourra donc former plus de 150 kilogrammes de pâte mécanique, propre à la papeterie. Il en résulte qu’un journal à grand tirage absorbe, à lui tout seul, une centaine d’arbres par numéro, en attribuant à son papier moitié de pâte de bois chimique et moitié de pâte de bois mécanique. Dans un demi-siècle, si l’on n’y prenait garde, toutes les forêts d’Europe seraient fauchées et imprimées à fond ; le bocage serait sans aucun mystère, et les rossignols de muraille seraient le dernier souvenir de leur poétique espèce…. » Un article de l’Illustration, analysé dans le Mémorial de la librairie française (22 novembre 1900, p. 622), prétend, au contraire, que cette disparition des forêts et leur transformation totale en papier n’est nullement à redouter. « Les forêts du Canada, lit-on dans cet article, sont, avec celles de la Sibérie, les plus vastes du monde. On les trouve partout, du Pacifique à l’Atlantique, et se renouvelant tous les vingt ans, elles sont, pour ainsi dire, inépuisables. Une des régions de la province de Québec peut, à elle seule, fournir plus de 500 000 tonnes de papier par an, et cela pendant un temps indéfini. » C’est être vraiment trop optimiste, et l’opinion précédente nous semble plus juste. D’abord il faut plus de vingt ans à une forêt pour se renouveler et se reconstituer ; ensuite la bouteille inépuisable est tout aussi chimérique que le mouvement perpétuel.  ↩